Mon instinct me pousse à travailler les grecs. Pour tout dire, on va travailler la base ; c’est à dire sonder ce que ce théâtre nous propose de mythique et de bel et bien réel. Ce n’est certes pas en cinq semaines que nous en viendrons à bout, mais il y a bien là de quoi insuffler.
J’ai opté pour Antigone et Aïax aka Ajax de Sophocle dans la traduction de Irène Bonnaud. C’est avant tout la pertinence de ses traductions, cette langue simple, concrète, versifiée, hantée, sculptée, mise à nue, qui m’a poussé à choisir ces deux textes fondateurs. Antigone est à l’opposé d’Aïax. L’un détient le record en termes d’adaptations, des ré-écritures, mais aussi de mises en scènes. L’autre est nettement moins connu. Héroïne d’un côté, anti héro de l’autre. Il y a là tant d’angles à interroger. Sociétales, théâtrales, interprétations.
Ces deux tragédies se font échos bien sûr dans le rituel de l’enterrement. Qui est une des pierres fondatrices de tout étude ethnologique. Le début d’un travail entre l’invisible et le visible, entre les dieux, les vivants, les morts, le souffle, la folie, la radicalité, la loi, la lâcheté, l’inconscient, le déni, tout ce qui constitue l’ordre et le nécessaire désordre social. Je commence toujours mes cycles de transmission par l’interrogation d’un classique. Il y a là une magnifique instabilité dans le socle qui m’intéresse. De quoi se faire les dents. Comme toujours, ce travail me permettra de traverser des principes de jeux qui me paraissent fondamentaux, et qui ont leur propre lexique. Grain, drive, chronologie, rythmique, musicalité, artisterie, chant, triangulaire, suggestion et dibouk, seront donc au menu. Le tout accompagné de dramaturgies contextuels, fictives, et contemporaines.
Gérard Watkins, parrain de la promotion 33
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